On trouvait déjà des vignes en 400 avant Jésus Christ à Fitou et ce vin était d’une telle qualité qu’il était déjà exporté en Italie et en Espagne. Au fil des siècles, nos sociétés se sont organisées, ont créé des normes et des labels qui ont conduit à l’AOC Fitou en 1948. Comment est-on passé d’un vin conditionné dans des amphores et transporté dans des chars à bœufs, à un vin réputé, dont l’étiquette prouvant l’AOC fait autorité ?
La préhistoire de l’AOC
Les labels officiels concernant le vin n’ont vu le jour qu’au XXe siècle, à cause des grandes crises viticoles qui ont secoué la profession au tout début du siècle. Elles débouchent en 1907 sur une révolte de vignerons qui réclame l’organisation du métier, assortie d’une protection pour faire face aux tromperies et fraudes. Avec la révolution industrielle et l’avènement du chemin de fer, les biens circulent beaucoup plus facilement et beaucoup plus vite mais, en contrepartie, les fraudes connaissent elles aussi une forte augmentation.
En 1919, une nouvelle loi est promulguée pour permettre de s’opposer en justice à un marchand revendiquant une appellation sans que le produit ne soit conforme à l’origine et aux « usages locaux, loyaux et constants » de ladite appellation. Concrètement, les « usages » se limiteront à la seule notion de terroir à la suite d’une jurisprudence. Il s’agit néanmoins ici des prémices de l’AOC et de la protection des producteurs de vin.
Dans les années 20 apparaissent les premières caves coopératives pour faire front, face à la crise viticole. Il faut se replonger dans le contexte de l’époque et se souvenir que les vins ne sont pas étiquetés. Ils se vendent en vrac à des négociants. Eux seuls peuvent faire la relation entre le producteur, son terroir et la qualité de son vin, contrairement à leurs clients qui boivent des vins sans en connaître l’origine.
L’histoire de l’Institut National des Appellations d’Origine – l’INAO
Naissance en 1935
Nous devons à Joseph Capus – sénateur de la Gironde entre 1930 et 1940 et ministre de l’agriculture quelques mois en 1924 – un décret-loi publié le 31 juillet 1935, qui traite de « la défense du marché des vins et du régime économique de l’alcool ». Un nouveau concept est né : l’Appellation d’Origine Contrôlée – l’AOC – gérée par le Comité national des appellations d’origine pour les vins et les eaux-de-vie.
Le principe original et inédit instaure une gouvernance du « Comité National des Appellations d’Origine » qui associe les professionnels de la viticulture et les administrations de l’État. C’est un gage d’impartialité du système qui dépasse les litiges et désaccords entre vignerons et négociants.
L’après-guerre
Le concept évolue après la deuxième guerre mondiale avec la création d’interprofessions régionales. Les alcools sont associés avec les Appellations d’Origine Réglementées – les AOR – et l’obligation d’un contrôle qualité par la dégustation est instaurée.
À la mort du président fondateur Joseph Capus, c’est le nouveau président, le baron Le Roy de Boiseaumarié, qui reprend l’affaire en main pour finaliser la création de l’Institut National des Appellations d’Origine – l’INAO.
Le succès du concept de l’AOC s’étend à d’autres produits que le vin et, en 1948, le premier « Congrès de l’origine » qui se tient à Deauville réunit non seulement les vins et les eaux-de-vie mais également les fromages ou les volailles de Bresse.
C’est le premier signe de l’élargissement du système des AOC à l’ensemble des productions agricoles et agroalimentaires.
L’élargissement de l’appellation à l’international
Le baron Le Roy veut maintenant faire connaître son concept au-delà de nos frontières et crée dans ce but l’Organisation Internationale de la Vigne et de vin – l’OIV – qu’il préside pendant plus de quinze ans.
Sa persévérance aboutit en 1958 à la signature à Lisbonne de l’Arrangement. Ses 27 pays membres militants de la protection des appellations d’origine s’y réunissent toujours aujourd’hui.
L’INAO des années 60
L’INAO poursuit son évolution gagnant toujours en compétence et en notoriété. Dans les années 60 commencent à se poser les questions sur son rôle dans les garanties apportées en matière de qualité.
Grâce à un dialogue constant avec la Commission Européenne, la défense des AOC passe par leur reconnaissance européenne et même au-delà des frontières de l’Europe. Le vins AOC français bénéficient d’une protection solide au sein de la Communauté Européenne.
L’INAO depuis les années 90
En 1990, les compétences de l’INAO comprennent les produits agricoles et agroalimentaires, les Indications GéoGraphiques protégées – IGP – et les produits forestiers.
En 2006, l’INAO est devenu l’Institut National de L’Origine et de la Qualité et sa compétence s’étend pour les labels officiels de qualité : AOC/AOP, IGP, Agriculture Biologique, Label Rouge, STG.
En 2009, il ajoute à son domaine de compétence les Vins de Pays, devenus vins IGP.
L’INAO – l’un des plus anciens organismes agricoles de France – a plus de 80 ans aujourd’hui. Il est la preuve de la permanence de l’objectif que s’est fixé l’agriculture française : disposer d’une politique de qualité exemplaire.
L’AOC Fitou
Au début du XXe siècle, le fait que les vins soient vendus en vrac et qu’ils ne soient pas étiquetés avec le nom de leur producteur les empêche de se faire connaître du grand public, seuls les négociants accordent au vin de Fitou des qualités remarquables.
En 1935, alors que Joseph Capus vient tout juste de lancer le concept de l’AOC, les viticulteurs de Fitou, Caves, Leucate, La Palme et Treilles lancent une demande de reconnaissance en AOC pour les vins rouges. Ils ont créé le « Comité de défense pour les vins de Fitou » dans ce but.
La deuxième guerre mondiale impose un long intermède dans cette démarche mais, dès la fin de la guerre, le comité de défense non seulement reprend sa lutte mais ajoute à ses membres les villages des hauts cantons : Tuchan, Paziols, Villeneuve et Cascastel.
En 1947, une délégation de l’INAO – qui vient tout juste d’être créé – se penche sur l’étude d’une appellation Fitou. La démarche aboutit grâce à la qualité du vin et le savoir-faire transmis de génération en génération.
Le décret du 28 avril 1948
Le 28 avril 1948, l’AOC Fitou est officiellement reconnue par décret.